dimanche 17 décembre 2017

Marcher sur de l'or, c'est possible... en Patagonie.


Fragment d'éternité


Écrire après
Et vivre dans le silence
Des solitudes


Écrire après
Sur des pages inconnues
Vierges d'immensité
Blanche

Des soupçons de devenir
L'encre déborde
Coule trop vite
Coule sur ma peau
Tatouée d'autrefois

Accepter l'instant
La proposition
Qui tombe du ciel
Pour diluer le mot
Sur ma ligne
En réinvention

Écrire après
Juste pour le geste
Juste pour la couleur
Juste pour la trace
Fragment d'éternité
Là où je ne fais que passer


© Marjorie Tixier, recueil en cours
© Photo: Pali Aike, Patagonie, Chili

mercredi 13 décembre 2017

Prenez vos écouteurs et offrez-vous une minute d'évasion!

Poème à écouter en musique, en cliquant sur ce lien:

https://soundcloud.com/user-808758008/dans-leau-pure-marjorie-tixier2017wav




Dans l'eau pure

 


Dans l'eau pure
Du calme où je me plonge
Dis-moi à quoi je songe
Sinon à écrire
Et à écrire encore

Ton amour
Au creux de mes vagues
Ton amour
Dans les pleins et les remous
Ton amour
Toujours vierge
Poussé vers de nouveaux rivages
Ton amour
Comme une anse d'or
Qui invite mes flots débordants

Les pensées sont vaines
Quand l'évidence s'aveugle encore
Dans le vide des jours
À la liberté du temps reposé
Les mots m'emportent
Petites vagues
Sur l'océan de mes pages à venir
Les mots m'emportent
Petites vagues
Sur l'océan de mes souvenirs

Seule raison d'être
Seule raison de me battre
Pour voguer demain
Sur l'eau tranquille
Des instants nouveaux

 
 
 
© Marjorie Tixier, Saint-Florent, 31/07/2017
© Photo: Gili Travangan
© Musique et flûte traversière, Marjorie Tixier 2017

dimanche 10 décembre 2017

Retour du poème... bonne lecture!



Au lieu d'inventer

 

 
À force de remplir des pages
Pour punir les miroirs
Trop lourde pour avancer
Mes matins ressemblant
Mes nuits avortées
Sous des yeux saupoudrés

À force de remplir des pages
Au lieu de vivre
Mes lettres se mouraient
En attente et sans but
À gargariser le temps
Pour mieux le faire passer

Vint le chagrin
Lourd chagrin
Où le vide a sonné
Vide blafard
Des sombres pensées
Pensées de larmes
Tombées
Juste tombées
Sur une année d'exil

Elles s'en iront

Il est des vérités à crier
Sur les paroles ineptes
Des hystéries à dénoncer

Des vérités à écrire
Au lieu d'inventer

 


Marjorie Tixier, 10/12/2017
In recueil en cours
Photo: Peinture Ajaccio, Corse 2017

lundi 4 décembre 2017

"Sentier des promesses" dans la lumière!

Après la neige et le gris du ciel... le soleil est de retour!

Nouvelle photo, plus lumineuse, donc!



Pour vous procurer ce recueil:

- Envoyez-moi votre adresse par courriel tixiermarjorie@gmail.com et je vous l'envoie avec une dédicace.
(Prix: 6.10 euros, frais de port offerts)

ou

- contactez mon éditeur sur son site:
http://encresvives.wixsite.com/michelcosem/contacts
( Prix: 6.10 euros, frais de port offerts)

dimanche 3 décembre 2017

"Sentier des promesses" est disponible!

L'écriture en été, le recueil en hiver




 Sentier des promesses est disponible!

 Vous le voulez?
 
C'est facile:
 
- Envoyez-moi votre adresse par courriel tixiermarjorie@gmail.com et je vous l'envoie avec une dédicace.
(Prix: 6.10 euros, frais de port offerts)

ou

- contactez mon éditeur sur son site:
http://encresvives.wixsite.com/michelcosem/contacts
( Prix: 6.10 euros, frais de port offerts)

 
Bonne lecture!

mercredi 15 novembre 2017

Elles ont trouvé le titre!


Bravo à Hélène d'Argento et Virginie Couderc Manissol
d'avoir relevé le défi et d'avoir trouvé le titre de mon recueil à paraître... bientôt!

mardi 14 novembre 2017

Bonne nouvelle!

J'ai la joie de vous annoncer que mes poèmes de Corse
vont être publiés aux éditions Encres vives
en décembre!
Soyez la première ou le premier à en deviner le titre et vous en recevrez, en avant-première, un exemplaire offert que je vous dédicacerai avec grand plaisir !

Besoin d'un petit indice?

Le titre est un vers d'un poème que vous pouvez retrouver dans mes publications du mois d'août - septembre...

Bonne chance!

mardi 7 novembre 2017

Dernier écho à la Biennale de Lyon




Mondes flottants

 
 
Sur la vague de soie
Flotte un manteau noir
Trapèze à l'assaut
D'un essaim migrant

Une pierre lourde et nacrée
Comme la vague
Comme les pieds
D'une même teinte tangue
Dans la vibration d'un vide

Qui le grava
Sur le rocher
Arraché de son fleuve

Qui fit de l'absence
Le tampon obsédant
D'un nuage fou
Vapeur hypnotique
Sur la silhouette
Aux cheveux déliés

Nul visage à regarder
Nul portrait sur le passeport
Des mondes flottants
Leur nom résonne
Aux extrémités du vide
Le corps pour seule frontière
 
 
 
 
 
© Marjorie Tixier, 06/11/2017
 
Photo prise à La Biennale d'art contemporain de Lyon.
"Forever Immigrant" de Marco Godinho, "Vide" de George Brecht, Drap de soie de Hans Haacke.

dimanche 5 novembre 2017

En écho à la Biennale de Lyon


 
 
D'aucun pays

 

Je ne suis
D'aucun pays
Que mon corps
Brisé
Recollé
Mon corps fracassé
Réparé
Mon corps envahi
Reconstruit

Je ne suis
D'aucune racine
Que mon silence
Mon silence imposé
Silence tyrannique
Aux yeux toujours absents

Je ne suis d'aucun bord
D'aucun refus
D'aucun accord

Je ne suis
Qu'une encre
Qui s'imbibe
Sur les pages
De mes horizons libres
La parole pour héritage
Et les souvenirs
Pour ancrage

Quand mes exils
Restent des langues tirées
Au mensonge assassiné
 
 
 
© Marjorie Tixier, Regard intérieur, 2017
 
Photo: Biennale d'art contemporain à Lyon, détail de l'œuvre de Marco Godinho "Forever Immigrant"
 
 

vendredi 3 novembre 2017

La mue à peine achevée, un coup de coeur de Librinova apparaît sur la toile!

Librinova
20 h
*COUP DE CŒUR*
Cette semaine, nous vous conseillons le premier roman de Marjorie Tixier, "La Danse du feu" ! Grâce à l'écriture de l'auteur, nous avons été emportés dans cette histoire captivante, mystérieuse et dansante qui parle de résilience et de rédemption grâce aux arts.
Alors on est sûrs que, vous aussi, vous serez transportés aux côtés de Sarah, une fillette joyeuse jusqu'au jour où son voisin envahit peu à peu son espace et qui, effrayée, se fait couper les cheveux par ses deux frères pour ressembler à un garçon et se protéger du danger... http://amzn.to/2h4YgIo

jeudi 2 novembre 2017

Coup de coeur de la Biennale d'art contemporain de Lyon




Immensité du vide


L'œil épouse la courbe
Des oiseaux en vol
Ce sont des migrateurs
Tout de béton en transformation
Ce sont
Toujours ces flottilles
En partance
À l'aplomb des vagues éphémères

À les suivre du regard
L'exil devient tranquille
Enfin
Compris peut-être
Assumé qui sait

La brutalité pleure plus vrai
Dans les silences suspendus

Il est de ces êtres poreux
Qui se démultiplient en escadrille
De ces grands sauvages
À la solitude liquide
Qui galopent à cru
Dans l'immensité du vide

Inutile de savoir
S'ils décollent
Ou s'ils reviennent
Leur trajectoire
Se suffit à elle-même

 

Marjorie Tixier, 02/11/2017

Biennale d'art contemporain de Lyon 2017
Photo: œuvre d'Héctor Zamora, Synclastic/ Anticlastic, 2010

lundi 30 octobre 2017

La mue se poursuit et prend du temps!

 
 
Un peu de lecture en attendant...
 
 
 
 
Elle dit



Elle dit
Qu'il a fallu transcender
La vie pour s'y tenir
Laisser l'âme
Explorer le beau
Pour revenir
Elle dit
Les pieds seront mouillés
Éclaboussés de flaques
Interdites
Elle dit
Les nuits seront
Encore sauvages
Opaques et transparentes
À ôter les sept voiles
Pour cueillir la raison
Elle dit
Les jours longs
Défieront les larmes
Pour assumer le silence
Et réinventer un chemin
Elle dit
La mue n'est pas comète
La mue passe les saisons
La mue se prépare
Dans le temps sage
Qui ne se compte plus
Elle dit
Le passage du ventre
À la voix perdue
De l'étouffement
Aux jambes de plomb
Elle dit
L'invention d'une recomposition
La couleur d'un corps
Qui ne s'était jamais vu
 
 
© Marjorie Tixier, Regard intérieur, 20/05/2017
Image retouchée, Pixabay
 
 
 
Ce poème est en écoute ici et j'en fais la lecture en musique!

dimanche 29 octobre 2017

"La Danse du feu" opère sa mue...




La Danse du feu opère sa mue...


Peau de poussière
Je t'avale
C'est le temps qu'il faut...
Le temps qu'il faut
Pour liquéfier le passé
Vieille maison
À nettoyer
Demeure aux volets fermés
Sombre
D'éclats de lumière
Éventrés sur le parquet
Peau de poussière
Sous mes mains chiffons
Je te nettoie
C'est le temps qu'il faut
Le temps qu'il faut
Pour sécher mes pieds mouillés
Qui glissent sur le parquet
Et fourmillent
Pour que ma vie continue
Peau de poussière
Salie qui s'en va
Abandonnée qui oublie
Vieille poupée perdue
Dans l'amnésie du jardin
Poupée salie
À la branche d'un arbre
Pendue
Double de l'enfant
Qui s'est sauvée
En dansant
Pleure
Petite fille fugueuse
Pleure
Sur le déni
Des absences alentour
Pleure
Et invente une autre histoire
Sur la peau de poussière
Qui s'envole au souffle du vent
Juste le temps qu'il faut
Le temps qu'il faut
Comme le meuble
À la cire rajeunit
Ta peau de chagrin
Ravalée
D'autres sillons se creuseront
Pour t'inventer
Juste le temps qu'il faut
Le temps qu'il faut
Pour ôter la poussière
Et ouvrir les volets



© Marjorie Tixier, poème "Peau de Poussière", 2017
Image retouchée Pixabay

samedi 21 octobre 2017

"Un Matin ordinaire" au fil des jours: petite pause


Pour varier les plaisirs, la suite de Un Matin ordinaire au fil des jours dans quelque temps...
 
Les déçus peuvent se ruer sur le texte entier en suivant le lien suivant:
 
http://bit.ly/2zdfqb1
Bientôt, la poésie sera de retour en lien direct avec La Danse du feu !
En attendant... bonne soirée à Valparaiso pour faire écho aux derniers mots de Laurence...
 
 
 
© Photo: Valparaiso

vendredi 20 octobre 2017

"Un Matin ordinaire" au fil des jours... nous voilà à la moitié du roman!




Je me lève, lentement, péniblement, un muscle après l’autre, comme une poupée désarticulée. L’arbre m’empêche de tomber.
Malgré la douleur, je me remets à courir. Je traverse le chemin, trébuche, le souffle court, et quitte la forêt les yeux partout. À la force de mes mains, je remonte le talus, m’agrippant aux branches pour rejoindre les hauteurs, à l'ombre des arbres touffus.
La ferme n’est pas loin.
Demander de l’aide ? Je frissonne de plus belle.
Je veux qu’on me protège. Je veux rester seule. Je tremble qu’on s’approche de moi, qu’un homme s’approche de moi…
Tant bien que mal, je progresse sur les hauteurs.
Un coup d’œil à la ferme.
Il est là.
Ma peau est douleur, transpercée.
Il est là, son moteur tourne.
Je l’ai déjà vu ici, au même endroit, garé devant cette ferme, tous les vendredis matin. Oui, je l’ai vu, chaque semaine, l’air de rien, en passant.
J’avance avec précaution.
Je veux savoir, j’ai peur mais je veux savoir.
Qui ? Qui m’a massacrée ?
En surplomb de la ferme, je me cache. Je veux savoir sans me montrer, rester protégée pour reprendre ma respiration. Sur la route, le monospace est toujours à l’arrêt, mais son moteur continue de tourner.
Mon corps se glace, je ne respire plus, j'observe.
Les deux hommes se connaissent, je ne me suis pas trompée.
Je pourrai retrouver celui qui m’a agressée.
La voiture démarre en trombe. Il rentre chez lui et retourne à sa vie pendant que je suis tapie comme une petite souris.
Tout se fragmente.
Je suis tremblante et gelée. Le souffle coupé, impuissante.
Un long silence s’installe, un silence qui pourtant n’est pas absolu. La nature a son langage, ses bruits ininterrompus. Mon corps aphone perçoit chaque son comme amplifié.
Silence trop bref pour récupérer, un moteur se fait entendre. Ma tête s’emballe, le tronc contre lequel je m’appuie s’amollit, ses branches deviennent des bras – ses bras ses brindilles deviennent des doigts – ses doigts pour me prendre à la gorge. Tout se déforme à mesure que le véhicule se rapproche.
Et s’il revenait sur sa décision ?
Le bruit devient visible, ma respiration se bloque. À la place du monospace gris, je vois s'approcher un fourgon.
Il passe devant la ferme mais ne s’y arrête pas.
C'est mon mari. Au volant, c’est Edmond. Il a dû croiser la voiture grise sans se douter de rien. Tout en moi s’affole. La peur se décuple au lieu de se calmer. Je pourrais descendre de cette butte, me poster sur la route et lui faire signe, mais je reste tétanisée.
Plus un son dans mes écouteurs, je m’aperçois qu’ils ont disparu. La musique s’est évanouie, le bruit du moteur s’est dissipé lui aussi, engouffré qu’il est dans la forêt.
Perdue en moi-même, je ne prête pas attention au ronronnement du fourgon qui a rebroussé chemin pour se garer devant la ferme. Mon mari sort du véhicule, frappe à l'entrée. Un jeune homme en uniforme lui ouvre la porte.
D’ici, je n’entends pas ce qu’ils se disent, mais je vois clairement mon mari gesticuler.
Le policier s’avance, calme et posé, aussitôt renforcé par deux collègues.
Edmond insiste, les deux agents se lancent des œillades complices pendant que le chef observe avec la froideur habituelle des policiers en service pour qui chaque individu est un éventuel suspect.
Mon mari s’énerve, hausse le ton jusqu’à ce que le propriétaire de la ferme fasse son apparition. La conversation reprend. Ils doivent parler de moi et se demander où je suis pendant que je les regarde. La situation est intenable, mais la peur m’empêche d’agir. Peur qu’il s’en prenne à mes filles.
Je lutte, le souffle court, les mains trempées. Je me fais violence pour sortir de l'ombre. Je veux savoir s'ils s'interrogent à mon sujet. Je veux rassurer mon mari. Je veux me protéger aussi.
Alors je me redresse comme un corps enseveli revient soudain à la vie.
Chaque pas est un défi.
Les hommes continuent à discuter sans me voir. Les arbustes me cachent encore. Ils m’entendent cependant, s’étonnent, cherchent à identifier la provenance du bruissement.
Ils jettent un œil dans ma direction et se mettent à rire. Tous, sauf Edmond. Le fermier s’avance d’un bon pas. Il veut découvrir ce qui se cache derrière cet étrange bruit-là.
Je me laisse glisser dans les fourrés, accroupie pour ne pas tomber.
À la manière d’un automate, j’avance. Seule l’intention de rassurer mon mari me guide, même s’il commence à m’effrayer lui aussi.
Une fois en bas, je me redresse petit à petit pour sortir des buissons et me camper sur le bord de la route comme un corps nu qui se donne au supplice.
Tous les regards se tournent vers moi.
Personne ne bouge à l’exception d’Edmond qui se précipite en criant mon prénom.
Mes mains couvrent mes yeux, instinctivement. Il s’arrête aussitôt.
Il pourrait m'assommer de questions, me secouer, me demander ce que je fais là, dans les fourrés comme une bête égarée.
Impossible de le regarder en face, impossible de se toucher.
Deux des policiers trépignent tandis que leur chef exige qu’on me laisse tranquille. Sans se presser, il vient vers moi, vers nous. Sa jeunesse devrait me rassurer, mais je garde encore les dents serrées.
Dans mes yeux baissés, il lit probablement bien plus que je ne le devine. Il connaît ça, lui. Il a l’habitude de voir des femmes comme moi se présenter au commissariat.
Je sais qu’il me faudra parler, dire, raconter, me justifier.
Il le sait aussi, lui qui nous propose de nous accompagner pour déposer plainte. Il constate l’état de choc, garde ses distances, n’affirme rien, mais laisse la porte ouverte. Il sait combien c’est difficile de raconter une telle épreuve.
Mon mari me prend dans ses bras, je reconnais son étreinte et me laisse faire. Il me serre de toutes ses forces tandis que mes mains font à nouveau rempart entre mon visage et sa poitrine.
Je tremble, j’ai froid, mon corps n’est plus qu’une ombre.
— Viens, me dit-il. Allons au commissariat.
— Emmène-moi plutôt à Valparaíso.
 
Pour lire la suite, c'est ici!

© Marjorie Tixier, Un Matin ordinaire, chapitre 8, Laurence
 
 

jeudi 19 octobre 2017

"Un Matin ordinaire" au fil des jours...





Ça fait sept ans que je vis ici. Avant je déménageais souvent pour cacher mes antécédents, mais je me plais bien au lotissement, ma femme et mes enfants aussi. Pour eux, j’ai essayé de me tenir, mais Vivi absent, je me suis senti perdu et j’ai dérapé.

Si je viens le voir tous les vendredis, c’est pas par hasard. Ça fait des semaines et des mois que j’y pense. Des mois et des semaines que le film se met en marche dès que je la vois passer derrière la fenêtre.

C’est pas le genre de Vivi de manquer notre rendez-vous. J’ai fait le tour de la propriété. Personne à part les poules et le coq. Un peu inquiet, j’ai essayé de l’appeler. Répondeur. Et puis j’ai pensé à la fille qui court.

D’habitude, je détourne la tête quand elle passe, alors que Vivi la regarde. Il me raconte que c’est la fille de Charles qui l’a élevée tout seul parce que sa femme est morte d’un cancer. Il dit qu’elle était gamine quand c’est arrivé. Elle a deux fillettes maintenant. Vivi ne l’appelle jamais par son prénom. Moi, je ne demande rien, je ne pose pas de questions.

Sans réfléchir, j’ai pris le volant de ma Scénic gris métallisé, choisie pour que Clément et Justine aient du confort et parce que le modèle est tellement répandu qu’elle passe inaperçue. J’ai avancé quelques centaines de mètres plus haut et je me suis arrêté sur le côté, dans la forêt, là où je me gare pour cueillir les champignons avec mes enfants.

Ensuite j’ai attendu la fille avec sa belle poitrine. Ça me manque, ma femme n’en a pas. Comme ça commençait à tourner à l’obsession, je lui ai proposé de lui payer des prothèses mammaires. Je gagne assez d’argent, largement assez pour lui offrir une opération. Ça m’aurait permis de tenir, mais Cathy préfère les bijoux et tout ce qui saute aux yeux. L’un n’empêche pas l’autre. Elle peut tout avoir si elle veut. Je ne lui refuse rien. Je lui ai même acheté une Mini Cooper rouge cerise pour fêter nos quinze ans de mariage et qu’elle puisse se pavaner à la sortie de l’école. Les crédits ne me font pas peur, je suis banquier.

Avec ma femme, je suis sans reproche. Jamais elle ne soupçonnerait mes incartades. Pareil pour mes enfants. Si on m’accusait de quoi que ce soit, je parie qu’ils sortiraient bec et ongles pour me défendre.

Quand j’étais étudiant, je me ruinais en putes. Avec le temps, j’ai appris à me maîtriser. Je ne voulais pas qu’on parle de moi comme de mon père quand j’étais petit. Alors j’ai fait des efforts, je me suis marié et j’essaie de résister.

J’ai regardé les minutes défiler sur l’horloge de ma voiture et j’ai pensé à la fille.

D’elle, Christiane disait qu’elle était courageuse de courir régulièrement, été comme hiver. Elle n’aurait jamais pu en faire autant. Elle avait toujours un mot gentil pour la fille qui court.

Elle avait toujours un mot gentil, tout court.

Moi, je me disais : Je me la ferais bien…

Ce que Vivi pensait, lui ?

Il ne me l’a jamais dit.
 
 

Pour lire la suite, c'est ici!



© Marjorie Tixier, Un Matin ordinaire, chapitre 7, Claude

 

 

Rencontre en librairie à Allevard le 11 septembre

  Prochaine rencontre à Allevard (38) Ce sera le mercredi, 11 septembre à 18h à la librairie Tuliquoi . Je me fais une joie de vous y retr...