Pour
tirer le rideau, j’y vais mollo. Je fronce à peine le tissu, mais assez pour bien
la voir. Je fais jamais ça pour Edmond, il m’intéresse que pour me dépanner
quand j’ai une petite fuite ou un petit désagrément. Il est bonne pâte. Je lui
donne une bouteille de bière ou de pastis, ça lui va toujours. Il me remercie
et me dit : À la prochaine.
Les
filles sont bien jolies, mais je cherche pas à les voir non plus. Elles font un
bruit ! Surtout quand elles jouent à la balançoire, ça chante à tue-tête,
en particulier la cadette qui vocifère des trucs sans queue ni tête. Le pire,
c’est l’été, dans la piscine. Les filles y passent leurs après-midi en petite
tenue, l’aînée (pas celle qui crie) porte un maillot de bain fuchsia sur lequel
est écrit en grandes lettres jaunes « Super nana » (elle croise les
bras sur son ventre quand quelqu’un s’approche, elle doit avoir honte, la
pauvre). L’eau gicle partout, ça hurle, ça crie, ça rit et ça patauge comme des
bécasses, le poste à fond avec cette même chanson en boucle qui a aucun sens,
sans doute d’un nouveau groupe de sauvages. Moi, connais pas.
Bref,
les filles, Julie et Annie, sont la plaie de mes vieilles oreilles. Dans le
silence de l’hiver, quand la neige tombe, elles arrivent encore à piailler en
faisant un bonhomme de neige.
La
voisine est calme, elle crie pas, sa voix de rossignol appelle. Si j’allais à
l’hôpital, j’aimerais qu’elle soit mon infirmière. Je sentirais ses seins se
pencher sur moi quand elle réglerait ma perfusion, ses jolis seins ronds, comme
les miens. Elle porterait sa blouse blanche, pas un tablier, non, une blouse,
toute propre chaque matin qui sentirait la lavande.
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© Marjorie Tixier, Un Matin ordinaire, chapitre 2, Thérèse
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